L’Arabie Saoudite, la nouvelle puissance du Moyen-Orient ?

Pays majeur de la péninsule arabique de par sa taille (plus de 2 millions de km²) et son poids économique (le 17ème PIB mondial), l’Arabie Saoudite est une monarchie constitutionnelle actuellement en pleine réforme. Mohammed Ben Salman, héritier du roi Abdelhaziz Al Saoud, dirige le pays depuis 2017, et ses décisions ont entraîné de nombreux conflits. Comment le prince veut asseoir son autorité ? Quel rôle l’Arabie Saoudite joue-t-elle dans la région  ? L’Entrevue Internationale se plonge dedans.

Le Prince Ben Salman, une autorité contestée ?

Au sein de son pays, les plans d’action du prince trouvent un écho dissonant. Dans une nation où la corruption est plus que présente, Ben Salman en a fait sa priorité depuis son accession au pouvoir. Le fait le plus marquant de cette « traque » fut la purge du 4 novembre 2017 où des membres de la famille royale et des investisseurs saoudiens ont été enfermés dans un hôtel luxueux (phénomène appelé la prison dorée). Le prince compte ainsi le soutien de son peuple mais il rentre directement en conflit avec la haute société.

De là un nouveau plan d’action va se mettre en place, principalement économique dans le but de relancer l’attractivité de l’Arabie Saoudite. Cette envie de renouveau entraine par conséquent une mise à mal des traditions. Réduction de la police religieuse, création d’une police privée, le prince affirme ses ambitions : démanteler pour mieux reconstruire. Il a par ailleurs lancé le projet Vision 2030 où il espère sortir le pays de la dépendance au pétrole tout en développant la bureaucratie et les réformes sociales. Cependant, ces objectifs ne sont pas sans critiques. Effectivement, Ben Salman est toujours sous la protection du roi mais celui-ci étant âgé de 84 ans, sa succession risque d’être controversée et par conséquent l’autorité du prince également.

En outre de sa revalorisation nationale, le dirigeant saoudien espère agrandir son hégémonie dans la péninsule arabique en devenant la puissance de la région.

Une hégémonie en demi-teinte

Déjà puissante de par sa superficie, l’Arabie Saoudite cherche à devenir le maillon fort du Moyen-Orient. Aujourd’hui, le pays est fortement aidé par les Etats-Unis sur le plan financier et structurel ce qui lui permet d’être influent dans la péninsule (Qatar, Oman, Yémen etc). L’Arabie Saoudite est ainsi le grand rival de l’Iran, d’une part sur le plan religieux avec le sunnisme pour l’Arabie Saoudite et le chiisme pour l’Iran (toutes deux branches de l’islam) ; et d’autre part sur leur influence politique respective.

L’Etat saoudien profite également d’un atout de taille, il n’est pas beaucoup touché par les guerres et par le terrorisme, ce qui en fait une nation stable et un garant de la région. Cependant, le pays intervient dans d’autres conflits hors de son territoire, comme au Yémen où l’Etat saoudien a du mal à avoir la main mise. La situation se répète en Syrie où cette fois l’Iran est aussi présente militairement. Au final, le prince Ben Salman est mal vu dans la région de par sa politique plus agressive que coopératrice. L’Arabie Saoudite se sent de plus en plus isolée dans la région, l’Egypte reste le seul allié de poids pour l’Etat saoudien.

Néanmoins, le prince n’abandonne pas ses ambitions à savoir faire rayonner le pays dans le monde. Afin d’y parvenir, Ben Salman a lancé un immense chantier en cours, le projet NEOM.

NEOM, la prochaine mégalopole mondiale ?

428 milliards de dollars, c’est la construction la plus coûteuse de l’histoire du Moyen-Orient. Le projet NEOM est en faite la construction d’une ville futuriste qui souhaite devenir l’épicentre du Moyen-Orient. Basé près du mont Sinaï au nord ouest du pays, la ville est dans un véritable carrefour : près de la Méditerranée, et à l’entrée de l’Afrique et de l’Asie. Ce chantier lancé en 2017 par Mohammed Ben Salman colle parfaitement aux ambitions du prince, moderniser le pays.

Effectivement, sur une affiche publicitaire du projet NEOM, les images nous présentent une ville qui ne ressemble en rien à une ville saoudienne. Utilisation des énergies renouvelables, concentration de nouvelles technologies, équité des genres ; cela contraste beaucoup avec la dépendance du pétrole et les codes vestimentaires pour les femmes. Mais c’est justement là-dessus que le prince espère convaincre, en brisant l’image des Occidentaux sur l’Arabie Saoudite.

La future méga cité espère rassembler le plus de personnes possibles notamment par sa dimension symbolique. Le mont Sinaï est un lieu important pour l’islam, le christianisme et le judaïsme, NEOM est d’ailleurs surnommé le « Veau d’or ». Les ambitions de la ville et de ses investisseurs sont claires, le projet se veut fini en 2030 et ils souhaitent devenir le PIB par habitant le plus important du monde. La crise du coronavirus entrave toutefois beaucoup la construction de la cité, des retards sont envisagés.

Conclusion

L’Arabie Saoudite arrive à un point de bascule de son histoire, celui de devenir la puissance du Moyen-Orient. Avec un prince ambitieux à sa tête et la construction de projets gigantesques, le pays bombe le torse devant ses alliés et ses rivaux. Toutefois, la situation reste encore déséquilibrée, le pétrole est toujours la source majoritaire du PIB saoudien, et le pays est mal perçu dans la région. Pour l’heure, le prince se concentre sur l’économie, qui continue de chuter avec la crise sanitaire mondiale.

Pistes d’approfondissement

Afin de comprendre en détail les enjeux du prince Ben Salman au niveau politique, économique et religieux, je vous conseille d’écouter ce podcast de RFI : Où va l’Arabie Saoudite ?

Lien : https://www.rfi.fr/fr/emission/20180225-arabie-saoudite-salman-politique-etrangere-iran