
Alors que les tensions vont croissantes en Asie-Pacifique, le « Quad », le Dialogue de Sécurité Quadrilatéral a profité d’un sommet, la semaine dernière, pour signaler l’unité et la détermination de ses membres. Le groupe informel, composé des États-Unis, de l’Inde, du Japon, et de l’Australie, cherche à contrer l’influence grandissante, notamment en matière militaire, de la Chine dans la région. Reste à voir s’il en aura les capacités sur le moyen terme.
Qui aura le dernier mot ? Alors que la Chine multiplie les entorses volontaires au droit international en Mer de Chine, où elle conteste les frontières maritimes de nombre de ses voisins, les puissances ayant des intérêts dans la région ont décidé de se coordonner. Bien qu’il existe depuis 2007, le « Quad » n’a jamais été aussi vivant qu’aujourd’hui. Ce groupe, lancé à l’origine pour organiser des manœuvres militaires communes et organiser des sommets multilatéraux entre ses membres, s’est réveillé en 2017, du fait des fortes tensions en Mer de Chine.
Ce nouveau sommet vient confirmer la réactivation du « Quad ». Organisé à Tokyo par le nouveau Premier Ministre, Yoshihide Suga, il réunissait les Ministres des Affaires Étrangères indien, japonais, australien, ainsi que le secrétaire d’État américain, Mike Pompeo. En ligne de mire, la Chine. Si le groupe s’est réactivé, c’est en bonne partie car tous ses membres ont des différends avec Pékin. Le Japon fait toujours face aux revendications chinoises sur les Îles Senkaku, l’Inde sur le Cachemire. L’Australie, qui avait critiqué Pékin sur son manque de transparence au début de la pandémie de Covid-19, déplore les contraintes économiques qui ont fait suite. Les États-Unis, comme tous les membres, s’inquiètent des provocations militaires chinoises. La Chine pénètre en effet régulièrement dans certaines frontières maritimes qu’elle revendique, au mépris du droit international. Récemment, la traversée de la frontière maritime − informelle − taïwanaise par des avions militaires chinois a provoqué la colère des États-Unis.

Mike Pompeo ne s’est donc pas fait prier pour accuser la Chine à l’issue du sommet : « La Chine a rendu la crise [sanitaire] infiniment pire… Nous devons nous protéger et protéger nos partenaires de l’exploitation, la corruption, la tyrannie du Parti Communiste Chinois. ». Il est pourtant le seul à le faire, les autres participants préférant ne pas viser Pékin directement. La Ministre des Affaires Étrangères australiennes, Marise Payne, se contente de rappeler que « La loi prévaut dans la région, pas la force », tandis que son homologue indien appelle à « Respecter les intégrités territoriales, résoudre les conflits pacifiquement ».
Élargir le groupe, une nécessité ?
Bien que le groupe semble solide et crédible, des fragilités apparaissent au grand jour. En effet, ce sursaut semble très conjoncturel : si le groupe se réunit, c’est que chacun des membres a un différend avec la Chine. Qu’adviendra-t-il du groupe si l’un de ses membres apaise ses relations avec Pékin, qui dénonce d’ores et déjà la volonté américaine de construire une OTAN asiatique ?
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Autre point faible du groupe : sa taille. S’il est composé de quatre membres, seuls l’Inde et le Japon sont situés sur le continent asiatique, laissant la majorité des autres pays ayant des différends territoriaux ou économiques avec la Chine sur le côté. Le groupe ne semble pourtant pas fermé à l’idée d’accueillir de nouveaux membres, mais aucun candidat ne s’est encore manifesté. Pour Kuni Miyake, président du Foreign Policy Institute, si de nombreux pays bénéficieraient d’un rapprochement avec le « Quad », aucun n’est encore prêt à y risquer sa relation avec Pékin.
L’avenir du « Quad » semble donc pour le moment incertain, d’autant plus qu’aucun accord d’envergure entre ses membres n’est encore à l’ordre du jour, bien qu’ils soient partenaires depuis longtemps.