Dimanche dernier, la Turquie a lancé des manœuvres militaires (annuelles) au large de la Chypre du Nord, mais au vu du contexte qui règne en Méditerranée, cela ne fait qu’attiser la flamme sur la situation en Chypre.
Crédit photo : Roman Robroek
L’île de Chypre, situé au croisement de l’Europe et du Moyen-Orient, est aujourd’hui convoité par ces derniers. Chypre est reconnu comme membre de l’Union Européenne mais la partie Nord elle, reste en marge de tout cela. Il s’agit de la République Turque de Chypre du Nord (RTCN), un Etat reconnu par la Turquie mais pas par l’ONU. La Grèce et la Turquie sont les deux principaux belligérants de Chypre et un conflit s’est ancré. Pourrait-il y avoir une cohabitation entre ces deux régions ? Quel avenir pour cet Etat : l’aube d’un projet de paix, ou au contraire une nouvelle guerre civile ? Pour comprendre cela, plongeons-nous dans l’île d’Aphrodite.
Un rapport historique de longue date
La relation entre la Grèce et la Turquie contient une dimension historique très ancienne sur l’ile. Effectivement, l’Etat de Chypre a été sous influence grecque durant toute la période hellénistique (323-146 avant notre ère), et a contrario il a été sous influence ottomane de 1591 à la fin du XIXe siècle. Des communautés grecques et turques se sont ainsi formées au XXe siècle, entraînant des différends politiques notamment durant le protectorat britannique.
Lors de l’indépendance du pays en 1960, un traité de garantie a été signé, permettant à la Grèce, la Turquie et au Royaume-Uni d’intervenir militairement sous certaines conditions. A cette même période, le pays est en proie à une violence colossale entre ces deux communautés : privilèges politiques, insécurité, épuration ethnique et surtout guerre civile. Les années 1970 marquent l’apogée de cette violence, les Chypriotes grecs voulant se rattacher à la Grèce, et les Chypriotes turcs voulant proclamer leur indépendance.
Finalement, en 1983, la République Turque de Chypre du Nord s’auto-proclame indépendante, et une grande démarcation est créée dans le pays afin de séparer les turcophones et les Grecs (démarcation qui existe encore actuellement). Cette frontière est finalement aujourd’hui la seule frontière terrestre entre les Grecs et les Turcs.
La miniature d’un conflit gréco-turc

Si le conflit gréco-turc se déroule en Méditerranée Orientale pour les hydrocarbures, l’île de Chypre reste l’arène principale. D’un côté, les Grecs veulent rendre les Chypriotes grecs maître de leur île puisque démographiquement, ces derniers sont plus nombreux que les Chypriotes turcs. De l’autre côté, la Turquie souhaite elle ramener des turcs sur le sol chypriote, permettant ainsi une réelle région turcophone.
Depuis plusieurs décennies, les différentes négociations organisées par les Nations Unies n’ont jamais abouti, malgré la proposition d’un Etat réunifié bi-communautaire. En effet, les Grecs ont toujours rejeté ce système de parité de par leur poids démographique.

En outre de ces conflits d’intérêts, la ligne de démarcation permet également de présenter deux régions différentes économiquement. L’intégration par l’Union Européenne de Chypre en 2004 a permis au pays de développer le tourisme et surtout de diversifier ses accords commerciaux.
A l’inverse de cela, la Turquie ne fait pas partie de l’UE, et son soutien vis-à-vis de la RTCN en est un obstacle. On en arrive finalement à une discorde presque continentale, où l’Europe demande à la Turquie d’arrêter se soutenir la partie nord. Cette discorde s’accentue de manière importante en ce moment, avec la découverte de gisements d’hydrocarbures qui vient mettre le feu aux poudres au conflit gréco-turque.
Conclusion

La situation est plus que complexe pour l’ONU. Garantir une identité historique, respecter les droits politiques de chacun, tels sont les enjeux à éclaircir dans les négociations. Les leaders de l’UE sont toutefois divisés sur ces négociations : Angela Merkel souhaite avant tout dialoguer avec le président Erdogan, mais Emmanuel Macron souhaite directement sanctionner le Chef d’Etat turc. Affaire à suivre…