Svalbard : tensions dans l’Océan Arctique

but février, la Russie a dénoncé la manière dont la Norvège agit à Svalbard. L’archipel, disposant d’un statut juridique particulier, est en effet régulièrement un sujet de tensions entre les deux pays, la Russie accusant la Norvège de ne pas respecter ce statut.

Le Parc national de Nordvest-Spitsbergen, à Svalbard | Photo : AWeith (CC BY-SA)

Svalbard, petit archipel norvégien situé dans l’océan Arctique, ne paye pas de mine sur le papier, malgré la beauté de ses paysages. Habité par environ 2500 personnes, il fait pourtant partie d’une nouvelle réalité géopolitique et, du fait de son statut particulier, attise les convoitises de puissances cherchant à s’implanter dans cette zone.

L’archipel, bien qu’appartenant à la Norvège officiellement, est régi par le Traité concernant le Spitzberg datant de 1920. La Norvège en est souveraine, mais doit garantir (entre autres) l’accès à l’archipel, le droit de pratiquer des activités économiques, et le droit d’exploiter les ressources naturelles à tous les signataires du traité. La souveraineté norvégienne sur ce territoire est donc assez relative.

Un casse-tête diplomatique

Profitant du statut de Svalbard, la Russie a pu s’implanter dans la région. Elle y exploite notamment une mine de charbon, et organise des circuits touristiques à Barentsburg, à l’Ouest de l’archipel. C’est dans ce contexte que la Russie accuse la Norvège de ne pas respecter l’égalité d’accès à l’économie promise par le traité. Le ministre des affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, s’est plaint, dans une lettre adressée à son homologue norvégien, de discriminations. Il y évoque notamment la zone de contrôle de la pêche, mise en place par les Norvégiens, qui irait à l’encontre du traité.

La zone de contrôle de la pêche établie à Svalbard

C’est en effet cette zone de contrôle de la pêche qui est au centre des tensions. Le traité, datant de 1920, ne statue rien sur les zones économiques exclusives (ZEE), apparues en 1982. C’est donc l’interprétation du traité sur ce sujet qui est le cœur du problème. La Norvège considère que le traité ne concerne que les eaux territoriales, et qu’il ne s’applique donc pas sur la ZEE de Svalbard, dont elle serait alors l’unique bénéficiaire. Une thèse que la Russie conteste, cette dernière considérant que le traité devrait s’appliquer à la ZEE comme il s’applique aux terres émergées. La Norvège ne revendique cependant pas cette ZEE, mais y a établi cette zone de contrôle de la pêche.

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La Norvège, elle, refuse les discussions bilatérales proposées par la Russie. Elle considère que, étant souveraine sur Svalbard, elle n’a pas à négocier la gestion de son territoire avec une autre puissance, et considère qu’elle respecte le traité. Par ailleurs, la Russie a mené des essais militaires fin 2019 dans l’Océan Arctique, montrant sa volonté de contrôler la zone autour de Svalbard et de sa frontière Nord.

L’Océan Arctique, enjeu géopolitique majeur

Cette rivalité locale permet de montrer l’importance nouvelle accordée à l’Océan Arctique par les grandes puissances. L’importance stratégique de cette région, considérée comme minime durant la guerre froide, est désormais reconnue par toutes les grandes puissances, qui cherchent donc à s’y implanter et à la contrôler. On comprend donc la volonté russe de garder la plus grande emprise possible sur un petit archipel comme Svalbard.

Au-delà de Svalbard, la Russie cherche à imposer sa présence militaire dans tout l’Océan arctique, auquel il accorde une importance maximale. En effet, les États-Unis et la Chine comptent bien contester la présence russe dans la région du fait des nouveaux enjeux économiques qu’elle renferme.

La nouvelle route maritime passant par l’Océan Arctique

L’importance économique de la région est en effet vouée à croître du fait de la fonte des glaces, qui ouvrira prochainement de nouvelles routes maritimes, permettant de réduire les distances effectuées par les porte-conteneurs pour acheminer les marchandises, notamment celles entre l’Europe et la Chine. Le trajet Rotterdam – Shanghai serait ainsi écourté de plus de 4 000 Km.

Auteur de l’article : Léo Berry

5 commentaires sur “Svalbard : tensions dans l’Océan Arctique

    Guy Marchal

    (26 avril 2020 - 15:57)

    Vive la Norvège, tu vas pouvoir aller voir cet archipel!

    MARCHAL Jacques

    (3 mai 2020 - 17:32)

    J’ai bien aimé cet article. Y-a-t-il d’autres zones similaires dans l’Océan Arctique ? Que pourra faire la Norvège entre Russie, Etats Unis, Chine sans l’Europe ?

      Léo Berry

      (3 mai 2020 - 18:31)

      Bonjour,

      Svalbard est un cas particulier, du fait des conséquences légales du traité. Néanmoins, l’Océan Arctique intéresse désormais toutes les grandes puissances, puisque la fonte des glaces ouvre de nouvelles routes maritimes, et que l’on pourrait y trouver de nouveaux gisements de pétrole et de gaz. Le droit international actuel ne permet pas aux États de revendiquer tout ou partie de l’Océan Arctique ou du Pôle Nord (à l’exception des ZEE).

      Pour le moment, la Norvège semble bien contrôler Svalbard. La Russie est le seul État qui s’y est implanté, et le traité affirme clairement la souveraineté norvégienne sur l’île (ce que la Norvège ne manque pas de rappeler au besoin). Si la Russie venait à être plus agressive, on peut imaginer que les autres grandes puissances se mettraient en opposition, mais difficile de dire comment.

    MARCHAL Jacques

    (4 mai 2020 - 12:06)

    Merci des deux réponses
    Avez-vous prévu d’actualiser certains de vos articles lorsque les points sont sensibles et évoluent … avec un système de lien avec l’article d’origine ?

      Léo Berry

      (4 mai 2020 - 13:24)

      Oui, nous pourrons faire de nouveaux articles si la situation évolue.

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