Des inscriptions chinoises sur un futur hôpital fidjien, des lignes de défense américaines en Micronésie, des transferts d’argent record en Australie : les îles Pacifiques ne sont pas si paisibles. Comment comprendre ces investissements parfois en milliards dans de si petits archipels ?
Les 14 Etats qui composent l’Océanie (excepté l’Australie et la Nouvelle Zélande), sont des pays créés très récemment, dans les années 1990 pour la plupart. Depuis leur création et leur indépendance, plusieurs grandes puissances mondiales aident ces petits pays à se développer, pour bénéficier des nombreux avantages économiques et géopolitiques que ces États disposent.
Une hégémonie chinoise
Si l’influence de Pékin s’étend sur toute l’Asie ainsi qu’une bonne partie de l’Afrique, le Pacifique n’échappe pas aux jumelles chinoises. Devenue l’une des toutes meilleures puissances économiques, la Chine a l’objectif de devenir le point central d’une nouvelle mondialisation, et cette mondialisation passe par les îles du Pacifique. Xi Jimping affirme cela en développant les archipels océaniens, soit en construisant des routes, soit des écoles voire des hôpitaux. La Papouasie Nouvelle-Guinée est l’exemple même de cette intervention chinoise : expansion du port principal du pays, constructions de routes, palais des sports flambant neuf, et visite du président chinois sur le sol papou plus d’une dizaine de fois en seulement 8 ans.
Quel est toutefois l’intérêt pour la Chine d’offrir autant d’argent à des Etats pauvres qui n’ont pas la capacité de rembourser ces prêts ? Ces investissements ont effectivement de nombreux avantages pour la Chine, en exemple la Papouasie Nouvelle-Guinée détient de nombreuses ressources minières en cours d’exploitation par le régime de Pékin (or, nickel, métaux rares), permettant ainsi d’atténuer le prêt. De plus, ces aides financières demandent une contre-partie géopolitique, à savoir de ne plus entretenir de relations avec Taïwan, et de la reconnaître comme province chinoise. Et cela marche puisque depuis la présence de la Chine dans le Pacifique ces vingt dernières années, 8 pays sur les 14 ont déjà cessé leurs relations avec Taïwan.
L’Australie obligée de répondre à cette « prise de pouvoir »
Face à cette expansion presque pharaonique de la Chine dans le Pacifique, les autres puissances mondiales doivent réagir aux vus de leur proximité avec les archipels océaniens.
La Chine est loin d’être la seule à investir dans les îles Pacifiques. L’Australie continue d’aider financièrement la majorité des États océaniens, même si ces investissements sont utilisés de manière radicalement différente : dans l’éducation, la santé, les travaux de reconstruction après les catastrophes naturelles etc. L’État australien souhaite devenir le garant de la région sur le plan économique et sécuritaire, mais elle ne peut plus compter sur l’aide américaine.
Depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, le Pacifique est passé au second plan sur les priorités américaines. Diminution des effectifs militaires, des bases navales en manque de rénovation, les Etats-Unis ne peuvent plus garantir une protection dans les Iles Pacifiques selon l’Université de Sydney. L’Australie se retrouve désormais seule protectrice d’une dizaine d’Etats qui sont très dépendants d’elle. Le régime de Canberra est de plus en plus inquiet sur la situation dans le Pacifique, d’autant que la Chine vient d’acheter trois porte-avions destinés à la surveillance du Pacifique.
Les investissements successifs dans les îles Pacifiques deviennent de plus en plus une source de conflits entre grandes puissances mondiales. L’Océanie, continent marginalisé, est en train devenir une zone de conflit géopolitique de grande envergure.
Pistes d’approfondissement :
Un excellent article de CNN pour comprendre la guerre d’influence entre Chine et Australie (en anglais)
https://edition.cnn.com/2019/07/22/asia/china-australia-pacific-investment-intl-hnk/index.html